La maladie bipolaire : qu’est-ce que c’est ?Autrefois appelé psychose maniaco-dépressive, le trouble bipolaire fait partie des troubles de l’humeur auxquels appartient également la dépression récurrente (ou trouble unipolaire).
C’est une maladie qui dans sa forme la plus typique comporte deux phases : la phase maniaque et la phase dépressive. Entre les deux pôles, la personne qui souffre de maladie bipolaire, retrouve un état normal que l’on appelle « euthymie » ou « normothymie ».
¤ La phase maniaque se définit comme un épisode d’excitation pathologique : le sujet qui en souffre est hyperactif et euphorique, inhabituellement volubile et fait de multiples projets. Il peut présenter divers troubles comportementaux, perdre toute inhibition ou engager des dépenses inconsidérées.
¤ La phase dépressive est en quelque sorte le miroir de la phase maniaque : le sujet présente des signes de grande tristesse, il est ralenti et n’a goût à rien, parfois il veut mourir ; les formes les plus sévères sont qualifiées de «mélancoliques». Le danger principal de cette maladie est le risque de suicide.
En France, le trouble bipolaire est sous-diagnostiqué. Il faut en moyenne 10 à 12 ans et quatre à cinq médecins différents avant qu’il ne soit nommé. De même, on estime que 40 % des dépressifs sont en réalité des bipolaires qui s'ignorent.
Aujourd'hui, on préfère le terme de trouble bipolaire à celui de psychose maniaco-dépressive. D'une part, parce que les formes cliniques sont en fait très diverses, alors que le terme de psychose maniaco-dépressive laisse penser que seules les formes où alternent des épisodes maniaques et des épisodes dépressifs sont prises en compte. D'autre part, parce que le terme de psychose renvoie à certaines théories explicatives mais correspond mal à l’observation purement descriptive de la maladie : entre les accès, le patient dans la plupart des cas a une vie psychique et sociale tout à fait normale, ce qui est inhabituel dans les cas de maladies psychotiques chroniques.
Classification des troubles bipolairesIl existe plusieurs classifications des troubles bipolaires, la plus communément utilisée est la suivante :
:star: Type I : Alternance de phases maniaques et dépressives entrecoupées d’intervalles libres. C’est la forme typique.
:star: Type II : Alternance de phases dépressives et hypomaniaques entrecoupées d’intervalles libres.
:star: Type III : Regroupe en fait 2 sous types : les sujets ne présentant que des épisodes maniaques ou hypomaniaques induits par des traitements anti-dépresseurs d’une part ; et d’autre part ceux ne présentant que des épisodes dépressifs mais associés à des antécédents familiaux de trouble bipolaire.
Les phases peuvent s’enchaîner de différentes façons :
:star: (Hypo-)manie - dépression - intervalle libre : Séquence classique dans les troubles bipolaires dits de type I et II.
:star: Dépression - (hypo)manie - intervalle libre : Séquence favorisée par la prise d’antidépresseurs provoquant un virage de l‘humeur (passage brutal de la dépression à la manie).
:star: Circulaire : Les phases s’enchaînent sans intervalle libre.
:star: Indéterminée : La périodicité est indéterminée, les enchaînements imprévisibles.
Rôle des évènements de vie stressantsC’est souvent rétrospectivement qu’on met en relation le déclenchement initial de la maladie bipolaire ou celui des récidives avec des évènements de vie stressants : perte d’un proche, déménagement, changement d’emploi, décalages horaires... Les consommations d’alcool et de toxiques, notamment le cannabis, seraient aussi des catalyseurs mais il faut rester prudent et ne pas confondre coïncidence dans le temps (d’autant plus sujette à caution qu’elle est relevée rétrospectivement) et relation de cause à effet. Tout se passe comme si ces évènements de vie interagissaient avec un « terrain » particulier, c'est-à-dire sur des individus fragiles ou vulnérables. En outre, les évènements de vie stressants pourraient avoir un impact croissant au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, c’est ce qu’on appelle la théorie de l’embrasement empruntée à l’épilepsie : au fil du temps des évènements de moindre importance déclencheraient les épisodes de plus en plus facilement jusqu’à ce que ces épisodes se déclenchent spontanément.
EvolutionLe début de la maladie bipolaire est souvent brusque, pour les premiers épisodes on identifie souvent des « facteurs déclenchants », évènements de vie qui coïncident avec l’apparition des symptômes et qui semblent les favoriser.
Un épisode maniaque inaugure le plus souvent les formes typiques de trouble bipolaire : il annonce dans plus de 80% des cas un trouble bipolaire.
L’évolution d‘un état maniaque comme celle d’un épisode dépressif non traité est en général de 4 à 8 mois. Le traitement permet de réduire la durée de ces accès.
L’évolution est irrégulière, la cyclicité tend à s’aggraver au cours du temps, les épisodes se rapprochant.
La durée des épisodes varie en fonction de la rapidité à l’instauration du traitement.
Cette évolution plutôt péjorative peut être enrayée par un traitement adapté instauré le plus précocement possible.
Une personne bipolaire non traitée aurait en moyenne une espérance de vie inférieure de 20 ans à l'espérance de vie dans la population générale, liée à différents risques.
Certains de ces facteurs défavorables ne sont pas accessibles à la prise en charge. Mais un traitement précoce, la prise en compte des comorbidités, un suivi régulier et une bonne relation thérapeutique entre médecin et malade sont autant de moyens de réduire les complications liées à la maladie bipolaire, et d’en améliorer le pronostic spontané. Il est donc très important de consulter dès le début des troubles et de maintenir le suivi au fil du temps.
Comorbidité :La maladie bipolaire s’accompagne d’une importante comorbidité, c'est-à-dire qu’elle est souvent associée à d’autres troubles. Cette association modifie souvent l’expression de la maladie et peut affecter son pronostic et la réponse au traitement. Il est donc primordial de dépister cette comorbidité et de la traiter conjointement au trouble bipolaire.
Elle concerne essentiellement :
:star: la consommation d’alcool et de toxiques- Selon certaines études, le risque d’alcoolisme est de 46% chez les personnes souffrant de trouble bipolaire contre 13% dans la population générale et celui de toxicomanie de 41% contre 6%.
- Ce risque est plus important pour les sujets qui soufrent de trouble bipolaire de type II et il est relativement plus considérable encore chez les femmes que chez les hommes. Ces données conduisent devant tout problème d’alcoolisme chez une femme à rechercher un possible diagnostic de bipolarité.
- Lorsque bipolarité et alcoolisme sont associés le pronostic est affecté : il y a alors davantage d’épisodes aigus et davantage de résistance aux traitements.
- Les relations entre l’alcoolisme et la bipolarité sont complexes : l’alcoolisme est-il secondaire au trouble bipolaire ? ou bien en est-il au contraire le déclencheur ? ou bien encore s’agit-t-il de la simple association de deux troubles qui partageraient peut-être des facteurs explicatifs communs ?
- D’un point de vue thérapeutique cette intrication est primordiale à prendre en considération, et la prise en charge doit tenir compte du fait que l’évaluation de l’état thymique (c’est-à-dire de l’humeur) se fait au mieux après sevrage et au terme d’une abstinence prolongée.
- Le trouble bipolaire peut aussi être associé à la consommation ou à la dépendance à d’autres toxiques (notamment cannabis) et de la même façon les soins doivent alors intégrer traitement du trouble de l’humeur et prise en charge de la toxicomanie.
:star: les troubles paniques- 20% des patients bipolaires présentent au cours de leur vie une forme de trouble anxieux appelée « trouble panique ».
- A l’inverse 13 à 23% des patients présentant un trouble panique sont bipolaires.
- Les patients bipolaires qui présentent aussi un trouble panique sont plus anxieux et présentent des symptômes plus sévères, des formes plus précoces, davantage d’épisodes dépressifs qui nécessitent plus de temps pour atteindre la rémission clinique et ont une réponse moins favorable au traitement. Ces sujets présentent un risque plus élevé de faire des tentatives de suicide.
:star: le trouble obsessionnel compulsif ou TOC- Il est fréquent chez les patients souffrant de troubles bipolaires.
- Cette association est plus souvent observée avec le trouble bipolaire de type II, elle concerne plus souvent des hommes et semble liée à un risque suicidaire plus élevé.
:star: les troubles des conduites alimentaires- Boulimie et trouble bipolaire peuvent être associés dans certains cas, en outre certains accès maniaques sont marqués par une augmentation exagérée de l’appétit.
:star: les troubles de la personnalité- Les relations entre maladie bipolaire et personnalité sont complexes. Schématiquement on peut dire que :
soit les caractéristiques de personnalité prédisposent au développement de la maladie comme la personnalité dite « hyperthymique » (caractère jovial, expansif…)
Soit elles expriment en elles-mêmes la maladie dans certaines formes atténuées, par exemple la personnalité dite « cyclothymique »
Soit certaines caractéristiques de la personnalité sont les conséquences de la maladie (on observe ainsi qu’en l’absence de soutien et dans les cas où les épisodes se répètent, peuvent parfois s’installer manque de confiance en soi, dépendance aux autres, sentiment d’insécurité…)
Soit elles influencent le cours évolutif de la maladie, favorisant par exemple l’exposition à certains évènements de vie stressants ou aux consommations d’alcool et de toxiques.
- Pendant les épisodes dépressifs, certains traits de personnalité comme l’anxiété ou le manque de confiance en soi se majorent, pour diminuer pendant les épisodes maniaques.
:star: le surpoids et l’obésité- Le surpoids (déterminé par un indice de masse corporelle, IMC, supérieur à 25) touche 58% des patients bipolaires. L’IMC est défini par le rapport du poids exprimé en kg et de la taille exprimée en mètres et portée au carré : IMC=P(kg)/T^2(m).
- Certains médicaments nécessaires à la prise en charge du trouble bipolaire peuvent favoriser la prise de poids.
:star: le diabèteLe diabète de type II ou diabète gras est plus fréquent chez les patients bipolaires que dans la population générale.
:star: les maladies cardiovasculaires Les maladies cardiovasculaires sont elles aussi plus fréquentes chez les bipolaires et cela peut être mis en relation avec le risque relativement plus élevé chez ces patients de développer diabète et surpoids, de présenter un trouble anxieux ou de mal respecter les règles d’hygiène de vie (consommation d’alcool notamment).
http://www.troubles-bipolaires.com/